Nous avons pu récemment écouter de belles paroles, lors des lectures de l’épître et de l’évangile, elles nous parlaient de la foi, et du service.
Saint Paul écrivait à Timothée (« Le craignant Dieu ») combien il est bon d’exprimer notre foi, don gratuit de la divinité, et même de la raviver. Et Jésus, dans l’évangile selon Luc 17, nous explique quelle est la puissance de la foi : «Si vous aviez de la foi, gros comme une graine de moutarde, vous auriez dit à l’arbre que voici: ‘Déracine-toi et va te planter dans la mer’, et il vous aurait obéi.»
Il est bien étrange que pour illustrer cette parole (qui semble impossible, un arbre a besoin de solide pour s’enraciner, on ne peut rien planter dans la mer) Jésus raconte cette histoire de serviteur, qui termine ainsi : De même vous aussi, quand vous aurez exécuté tout ce qui vous a été ordonné, dites : ‘Nous sommes des serviteurs inutiles : nous n’avons fait que notre devoir’».
Notez bien la traduction, Jésus a réellement dit cela: serviteur inutile, et non pas de «simples serviteurs».
Ce paradoxe (encore un ?) de l’Écriture, de la Parole de Dieu, sert, comme presque à chaque fois, à titiller notre questionnement. Comment un serviteur peut-il être inutile ? Son rôle est de servir, de «labourer ou garder les bêtes», puis de « servir le maître de maison à manger et à boire».
Jésus nous donne deux occasions de réfléchir :
- À quoi mène la foi, quand on la ravive, quand on l’exalte, quand on demande à Dieu de l’augmenter en nous ?
- Que devient le serviteur quand il a fini son travail ?
1. Rappelons que la foi est l’assentiment de l’intelligence à la Vérité révélée. (D’après le Catéchisme de l’Église Catholique)
Avoir la foi, c’est se dire en soi-même «j’adhère à l’écriture sainte, j’adhère à l’enseignement de Moïse, à celui des prophètes, et à l’enseignement du Christ». Et ce, avant même la compréhension. C’est être capable de se dire, «c’est vrai» avant de comprendre. C’est prendre à rebours le chemin habituel qui est de rejeter ce qui semble inaccessible. Et c’est justement cette adhésion, cette foi, qui va ouvrir les chemins de la compréhension. Comme le disaient Saint Augustin, et Saint Jean-Paul II, je crois pour comprendre, et je comprends pour croire.
Cette confiance, qui n’est pas une confiance aveugle, mais une confiance éclairée, nous transforme et nous met en mouvement, le mouvement vers Dieu, vers les autres.
Et celui-ci se manifeste par le service.
La plus belle preuve, même si elle est bien reniée de nos jours, c’est l’héritage chrétien de notre civilisation, qui s’est ordonné dans les premières écoles, universités, hôpitaux, séminaires, missions.
Le christianisme, au travers de chrétiens qui se sont mis au service des autres, est à l’origine de toutes ces institutions.
La foi mène à la confiance en Dieu, en l’espérance, et au service d’autrui.
2. Mais alors à quoi mène le service, surtout quand il est accompli parfaitement, c’est-à-dire totalement accompli ?
La perfection selon la culture hébraïque, celle de Jésus, est l’accomplissement complet, quand « tout est accompli » (Jean 19, 30), alors la perfection est atteinte. C’est pourquoi la perfection hébraïque est tout à fait possible, contrairement à la perfection classique, qui désigne un idéal théorique inatteignable. C’est bien le cas de notre serviteur, il a fini tout son devoir, il n’y a plus rien à faire au titre du service, c’est pourquoi, au titre du service, il est devenu inutile.
Cependant il est toujours là, et si, en tant que serviteur, il est inutile, il endosse alors un autre rôle.
Les rôles dans une maison typique sont bien déterminés. Il y a le maître de maison, les fils du maître de maison, et les serviteurs. On trouve bien cette distinction dans la parabole du fils prodigue (Luc 15, donc juste avant notre texte), et dans l’enseignement de Jésus à propos de l’impôt dû au temple (Matthieu 17,25).
Jésus nous propose de comprendre que le serviteur, s’il est devenu inutile, une fois son service accompli, passe au statut de fils. Il n’y a pas d’autre position.
Et c’est notre chemin, d’être au service, et de devenir Fils.
Le service est une route vers la filiation, gloire et honneur du chrétien, don non mesurable que Dieu nous accorde.
Et tout est don dans ce chemin: La foi est un don, qui nous fait recevoir la capacité et l’envie de service, qui quand nous l’accomplissons nous permet d’accéder au pouvoir de nous dire fils de Dieu.
Nous illustrons notre propos par une image de Jésus marchant sur les eaux.
« Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? Et ils montèrent dans la barque, et le vent cessa. Ceux qui étaient dans la barque vinrent se prosterner devant Jésus, et dirent: Tu es véritablement le Fils de Dieu. » (Matthieu 14, 31-33)
Il est aussi question de foi, et les disciples, en reconnaissant la foi dont fait preuve Jésus, le reconnaissent comme fils de Dieu. Nous pouvons faire le lien avec le début du texte: Jésus, figure de l’arbre de Vie, marche, se plante, dans la mer. C’est ainsi que la foi peut faire se planter des arbres dans la mer.
Eric PORTAL, animateur du groupe d’étude biblique de la paroisse.
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